Bonjour à tous,
Comme annoncé dans notre premier post, Luca et moi voulions séparer le récit de nos expériences vécues en Angleterre en vous les racontant du point de vue de chacun.
Par ce post je vais vous décrire mes premières impressions suite à mes débuts au sein du North West Ambulance Service (NWAS).
Lors de la préparation de mon dossier de candidature pour l'ESAMB, j'avais déjà repéré la possibilité de réaliser un stage à l'étranger et je m'étais dit qu'il fallait absolument que je réalise cette expérience. Et me voilà, après 2 ans de formation, à l'avant d'une ambulance anglaise en route pour porter assistance à une personne.
Jour J :
Pour mon premier jour de stage, je me suis rendu à la centrale de Sharston avec une météo typiquement mancunienne. Ce n'était pas le soleil qui m'accompagnait mais bien une pluie battante (petite pensée pour Luca qui a dû partir à vélo ce matin là).
Sur place, je fais la connaissance de John, un ambulancier avec plus de trente ans d'expérience, et de Neil, un "emergency medical technician" (EMT). Les deux travaillent en binôme depuis plus de huit ans. C'est avec eux que je serai le plus souvent durant les huit prochaines semaines. Ici une ambulance est constituée d'un paramedic et d'un EMT ou de deux paramedics. Il n'y pas de changement de binôme sauf lors de congés spéciaux mais en général les binômes de travail sont fixes pour plusieurs années ce qui permet une belle synergie de travail lors d'interventions critiques.
Après un tour du véhicule pour me montrer où se trouve le matériel ainsi que le fonctionnement de la rampe de chargement nous partons pour notre première mission.
De 10h à 22h nous enchainerons les missions avec une pause de trente minutes obligatoire pour manger. Ici pas le temps de se reposer. Sur mes premiers jours de stage, nous recevions une mission dans les dix minutes après s'être annoncés disponibles auprès du dispatch et nous ne revenions en centrale que pour manger et rendre le véhicule en fin de journée.
Beaucoup d'appels et peu de transports :
De manière générale, en prenant mon service, de jour comme de nuit, je peux être sûr de faire au minimum six interventions dans la journée. Six missions sur douze heures cela nous donne environ deux heures par mission. Pourquoi autant de temps ?
Tout d'abord, en cas d'urgences vitales, l'efficacité et la rapidité d'administration de traitement est similaire à chez nous à quelques détails près parfois.
Là où le temps sur site se rallonge, c'est lors des missions pour des urgences non vitales. Bon nombre d'appels sont pour des cas vraiment bénins ou qui ne nécessitent pas un transport à l'hôpital dans l'immédiat.
Alors entre en jeu un des points positifs du système anglais : l'appel au médecin traitant. En Angleterre, n'importe quel professionnel de la santé peut avoir accès au dossier médical d'un-e patient-e et y ajouter une "note" (pour les paramedics c'est la possibilité d'y ajouter la FIP). Cela permet au médecin traitant du-de la patient-e de pouvoir consulter cette "note" lors d'un rendez-vous ultérieur et ainsi de voir les symptômes et les signes vitaux présents lors de notre intervention.
Pour nous sur place, cela nous permet d'avoir accès aux précédentes prise en charge et de pouvoir constater une amélioration ou péjoration de l'état du-de la patient-e sur ces derniers mois, dernières années (par exemple, cela est très utiles pour les ECG où, en cas d'anomalies visibles, on peut vérifier si celles-ci sont nouvelles ou déjà existantes sur un ECG antérieur présent dans le dossier).
Pour que cela soit efficace, il faut que les dossiers soient remplis correctement et avec des informations pertinentes donc cela peut parfois prendre du temps, beaucoup de temps.
La mentalité de travail ici est vraiment de favoriser le-la patient-e laissé-e sur site. Les "non-transports" atteignent 40% à ce jour et cela est possible grâce aux multiples alternatives présentes pour limiter le transport à l'hôpital. Il y a l'appel au médecin traitant (décrit plus haut) ou encore l'appel à la "crisis team" qui est une équipe infirmière qui vient au domicile du patient pour élaborer un plan de soins et mettre en place des soins à domicile.
Dans cette mentalité du laissé sur site, il est aussi possible de traiter le patient sur place pour lui permettre de rester à domicile un peu plus longtemps. Il m'est donc arrivé d'administrer de l'oxygène à un patient pour lui faire remonter sa saturation et le laisser à domicile jusqu'au lendemain où il ira voir son médecin traitant (que l'on aura avertit grâce à notre "note" dans son dossier) qui pourra ainsi ajuster son traitement pour éviter qu'il rappelle l'ambulance. Bien entendu, si entre temps la situation évolue, le patient est invité à rappeler le numéro d'urgence. Cela marche aussi avec les hypoglycémies mais mon ami Luca sera plus apte à raconter cela s'il le désire.
Le dernier aspect concernant les temps d'intervention est liés aux infrastructures hospitalières. Malgré toutes ces solutions pour favoriser le-la patient-e laissé sur site, il n'est parfois pas possible de le réaliser et on se retrouve alors à transporter des personnes qui attendront de longues heures aux urgences avant d'être prises en charges. Par ce temps d'attente, j'évoque aussi notre temps d'attente avant de se faire "trier". Cela dépend des jours mais il m'est souvent arrivé d'attendre environ une heure avant que l'infirmier-ère de tri nous indique un box pour transmettre notre patient. Des paramedics m'ont raconté que lors du COVID certains d'entre eux avait attendu jusqu'à dix heures avec leur patient.
Cette dernière partie évoquant les temps d'attente aux urgences renforce la mentalité de tout faire pour laisser les patients à domicile si cela est possible. Cela me permet également de faire une bonne transition pour mon prochain post où j'évoquerai les principales différences entre le système de santé anglais et le système suisse en restant dans les grandes lignes.
Même si le rôle de l'ambulancier ne diffère pas grandement entre les deux pays, le reste du système qui entoure ce métier laisse place à quelques scènes surprenantes.
Merci pour votre lecture et à bientôt,
Nicolas
Etudiant ambulancier de 3ème année.
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